La Suisse est un miracle, un succès qui dure depuis 728 ans grâce à son système de milice et son esprit de cohésion !
Didier Castella
La Liberté, 2 août 2019 – Magalie Goumaz
Adèle Weber, jeune militante pour le climat, était l’oratrice de la fête nationale au Mouret hier soir devant plus de 400 personnes. Elle a enjoint tout un chacun à agir pour préserver la biodiversité
Discours » L’ÄlggiAlp, à Sachseln (OW), a vécu hier sa première Landsgemeinde nationale pour le climat. Plus près de chez nous, la commune du Mouret a aussi changé de discours. Hier soir, c’est la jeune Adèle Weber, 15 ans, qui était l’oratrice du 1er Août. Une idée de la conseillère communale Gisèle Marthe. «La mobilisation de ces jeunes m’a interpellée, confie-t-elle. Et j’ai trouvé important de leur donner la parole, car ils sont notre avenir. Nous avons alors cherché qui, dans le village, pouvait tenir ce rôle.» Et lorsque la perle rare est apparue, «nous avons foncé», complète le syndic, Nicolas Lauper.
Le Conseil communal n’a donné aucune instruction à la jeune fille. «Ils m’ont dit qu’ils me faisaient confiance, raconte Adèle Weber. J’ai toutefois reçu ce conseil: imprimer mon discours en grand et souligner les passages plus difficiles.» Elle a écrit seule son texte mais s’est fait conseiller par ses proches, notamment son grand frère.
«C’est vous qui décidez»
Sur le coup des 21 h, la militante a ainsi pris le micro. Un peu stressée, elle n’a pas fait de grands détours pour exprimer le fond de sa pensée. Elle a évoqué les conséquences du réchauffement climatique en Suisse et dans le monde mais aussi la perte de la biodiversité, invitant chacun à agir pour inverser la tendance. «Nous pouvons agir à notre niveau pour sortir de ce calvaire qui nous fait peur, à nous les jeunes et j’espère à vous aussi», a-t-elle lancé. S’adressant aux plus de 400 personnes présentes au Mouret, elle leur a dit: «Vous le savez, le plus grand pouvoir appartient au peuple, c’est vous qui décidez et pas encore nous. Vous qui êtes nos parents, faites le bon choix pour notre avenir commun, proche ou lointain.»
Adèle Weber est à l’aise dans son rôle d’oratrice, car son engagement ne doit rien au hasard. Elle ne suit pas non plus aveuglément le mouvement. Et bien qu’elle ait une légère ressemblance avec la jeune Suédoise Greta Thunberg, elle n’en est pas spécialement fan. «Je salue son courage, et ce qu’elle a initié. Mais je ne m’y intéresse pas plus que ça», confie-t-elle la veille de sa prestation.
Le climat, c’est son affaire depuis toute petite. «Mon papa est ingénieur forestier. Avec lui, nous nous promenons beaucoup dans la nature, et il nous a toujours sensibilisés à l’environnement», raconte-t-elle encore. Par contre, la mobilisation encouragée par Greta Thunberg a permis à Adèle Weber de trouver une nouvelle dynamique, de faire cause commune avec les jeunes de sa génération. Depuis quelques mois, elle se sent moins seule. «Avant, je faisais déjà des efforts pour protéger le climat et l’environnement. Aujourd’hui, c’est devenu une règle, que je veux partager avec beaucoup d’autres personnes, car si chacun s’y met on peut vraiment amener du changement», explique-t-elle. Pour Adèle Weber, cela signifie manger bio et moins de viande, limiter l’utilisation d’internet, freiner sa consommation, économiser l’eau, acheter ses vêtements dans les friperies, prendre les transports publics, etc.
Dès l’annonce de la première grève, Adèle Weber s’est sentie concernée et, depuis, elle s’implique dans le mouvement, notamment en tant que répondante pour le Cycle d’orientation de Marly, où le «noyau dur» comprend une vingtaine de personnes. «Notre message y est bien reçu», assure-t-elle.
Cet engagement n’étonne pas sa maman, Anne. «Je salue cette prise de conscience de la part des jeunes», dit-elle. Et elle se range derrière les choix de sa fille. «Adèle a les pieds sur terre. Je lui fais confiance, car ce n’est pas une tête brûlée. Une véritable réflexion accompagne ce qu’elle entreprend.» Et tant pis pour les trois absences injustifiées notifiées par l’école.
Et le plastique?
Bien sûr que la jeune fille entend les critiques sur ces jeunes qui font la grève pour le climat mais partent en avion à Barcelone, laissent traîner leurs déchets dans les lieux publics et se précipitent pour avoir les téléphones dernier cri. Pas de ça hier soir au Mouret, qui n’a jamais été aussi fier de son label Cité de l’énergie. En présentant l’oratrice du jour, le conseiller communal Armand Dousse a réclamé un «tonnerre d’applaudissements pour la soutenir». Par contre, un citoyen fait remarquer que la commune aurait pu aller jusqu’au bout de son idée et remplacer les couverts en plastique par des couverts recyclables ou biodégradables. A bon entendeur!
Pour sa part, Adèle Weber renvoie la critique qu’elle entend depuis le début: «La société actuelle est conçue pour nous faire consommer. Les jeunes, mais aussi les adultes, s’y sont habitués», déclare-t-elle. Et elle ne pense pas que le mouvement des jeunes va s’essouffler. «Le mois de juin est toujours très chargé pour les étudiants. Et maintenant nous sommes en vacances. Mais je vois que, sur les réseaux sociaux, il se passe toujours quelque chose, et nos actions vont reprendre à la rentrée», assure celle qui compte bien poursuivre son combat, et pas seulement sur les podiums.
«Nous devons être fiers»
Le conseiller fédéral chargé du Département de l’économie, de la formation et de la recherche était à Gletterens mercredi soir.
Le chef du Département fédéral de l’économie, de la formation et de la recherche (DEFR) s’est arrêté à Gletterens, mercredi soir à l’occasion de la fête nationale.
Dans la commune broyarde, Guy Parmelin est venu «prendre le pouls du pays» et de ses citoyens. Il s’est livré à l’exercice du discours, honneur relevant pour lui «presque du spirituel». Il en a profité pour souligner la «belle vitalité» de la démocratie directe helvétique mais aussi de la société civile et de la recherche scientifique. «Par rapport à d’autres pays, nous avons plus d’une raison d’être fiers», a-t-il ajouté, estimant que «la Suisse a plus d’avantages et de potentiels que de problèmes».
Le conseiller fédéral a terminé en mentionnant le mathématicien bâlois Leonhard Euler (1707-1783). Un savant dont les qualités illustrent les «atouts et les valeurs de notre pays: une terre de démocratie, vouée au travail, une inlassable curiosité, et une dose supérieure de talent et de créativité pour l’assouvir avec brio». MARTIN BERNARD
«Ce parc, c’est notre identité helvétique»
La conseillère fédérale Simonetta Sommaruga s’est rendue hier au cœur du Parc national Gruyère Pays-d’Enhaut où elle a parlé de la biodiversité, thème qu’elle-même avait choisi.
C’est en Gruyère que la conseillère fédérale Simonetta Sommaruga avait décidé de se rendre hier pour la fête nationale. Rendez-vous était pris dans les hauteurs de Montbovon, au cœur du Parc national Gruyère Pays-d’Enhaut, où les responsables lui avaient préparé tout un programme sur le thème de la biodiversité. Thème que l’élue socialiste avait elle-même choisi.
Au bout de la vallée de l’Intyamon, avec vue sur le col de Jaman, la Gummfluh, etc., on lui a notamment parlé des zones protégées, d’agriculture alpestre, de prairies sèches, de gestion des forêts, des vergers hautes tiges, des incohérences des paiements directs en matière de biodiversité. Mais aussi des espèces menacées, comme ce papillon dont la rareté en Suisse est équivalente à celle du lion ou de la girafe dans le monde.
Attentive, curieuse, disponible, «impressionnée», Simonetta Sommaruga, a écouté, beaucoup. Posé des questions, aussi. «J’ai vu la valeur extraordinaire d’un tel parc naturel», a-t-elle dit après avoir parcouru ce coin de pays pendant quelques heures aux côtés du conseiller d’Etat Didier Castella, aux petits soins avec elle.
«Ces parcs, ce sont aussi des projets pilotes où l’on réfléchit entre biologistes et agriculteurs. Il y a une collaboration exceptionnelle. Le travail est fait ensemble, il y a la recherche de solutions. C’est en fait notre identité helvétique. C’est beau, et nous en sommes fiers», a-t-elle lancé avant d’être chaudement applaudie par la trentaine de personnes – représentants des communes, journalistes, personnel du parc, etc. – présentes à ses côtés.
Mais que ramènera-t-elle à Berne face à la déferlante d’informations qu’on lui a transmises? «De l’émotion! J’ai toujours fait de la politique sur le terrain. J’ai besoin de marcher, de parler avec des personnes compétentes, de sentir. Tout ce que j’ai vu et entendu aujourd’hui, ce sont des choses dont on ne se rend pas compte si on reste dans son bureau à lire des rapports», a-t-elle ajouté. Et de promettre que «nous avons du travail à faire pour la biodiversité. Ici, j’ai pu voir où sont les enjeux et les bons exemples à suivre.»
Tonalité peut-être un poil plus politique dans le bourg médiéval de Gruyères, où la conseillère fédérale a passé la fin de la journée. Dans son discours à la population, elle a estimé qu’il était temps que les politiciens prennent des mesures «concrètes et efficaces» contre le réchauffement climatique.
Celle qui est désormais à la tête du Département fédéral de l’environnement a évoqué «des faits» qui n’ont rien d’une «hystérie». «Notre responsabilité est en jeu», a-t-elle lancé. Et d’en appeler aux entreprises qui, selon elle, «ont toutes les connaissances nécessaires» pour faire face à la question climatique.
GUILLAUME CHILLIER
La fête à la plage
A Estavayer-le-Lac, les festivités du 1er Août n’ont pas eu lieu à l’Estivale mais à la Nouvelle Plage. Une première.
Deux fêtes, deux ambiances dans la cité à la Rose, hier soir. Pour la première fois depuis de nombreuses années, le 1er Août organisé par la commune d’Estavayer s’est déroulé sans l’Estivale. D’entente avec les autorités communales, le festival staviacois avait décidé de faire bande à part. Accueillir la fête nationale était devenu difficile pour l’organisation, notamment au niveau financier. «C’était une soirée gratuite, souvent en demi-teinte, qui pouvait aussi, selon le calendrier, allonger la durée du festival ou tomber un samedi, la plus grosse soirée du festival», confie Aurélie Haenni, responsable communication du festival.
Les festivités communales ont donc eu lieu à la Nouvelle Plage, à quelques centaines de mètres du site de l’Estivale. Dans une tout autre atmosphère. Pour ne pas faire de la concurrence à la manifestation de la commune, les organisateurs de l’Estivale avait prévu une soirée rap et hip-hop dédiée aux jeunes, «qui ne vont pas forcément écouter les discours du 1er Août», glisse Aurélie Haenni. Pour ne pas gêner, les concerts ont aussi cessé entre 21 h 15 et 22 h 30.
Sur place, la plupart des festivaliers rencontrés n’étaient pas vraiment au courant de ce changement. «Nous venons de toute façon chaque année», souffle un père de famille, venu avec sa compagne et leurs deux adolescents.
Certains commerçants se sont montrés plus sceptiques à l’égard de cette nouvelle formule, et surtout de la soirée consacrée aux jeunes. «C’est un peu pénalisant pour nous, assure Jacques Heiniger, vendeur de Fish & Chips. Les jeunes ont moins d’argent et consomment donc moins que les adultes. C’est peut-être plus avantageux pour le festival d’avoir cette soirée payante mais pas forcément pour nous.»
Du côté de la Nouvelle Plage, les festivités du 1er Août se sont déroulées dans une ambiance plus patriotique, au rythme des airs traditionnels joués par l’Harmonie locale. Mais la foule était au rendez-vous.
Des stands de nourriture et de boissons étaient installés au bord de l’eau. Plus tôt dans la soirée, une prestation de danse flamenco s’est jouée sur la terrasse du restaurant de la plage. «Ça ne nous gêne pas de ne plus être dans l’enceinte de l’Estivale, glissent Alain Sugnaux et sa femme Sophie, de Payerne. C’est plus calme, il y a moins de monde, et plus de place pour s’asseoir.» Quelques mètres plus loin, Dieter-Léo Fuchter, de Baulmes, est plus réservé. «C’est un peu dommage d’avoir dissocié les deux événements. Il y a moins de jeunes et de musique. Heureusement, le lac est toujours là!»
De leur côté, les autorités communales ont accueilli positivement ce changement. «L’Estivale pourra désormais avoir lieu à des dates fixes et la Fête nationale rester gratuite pour tous», se réjouit André Losey, syndic d’Estavayer-le-Lac. La formule devrait donc être reconduite à l’avenir.
A l’Estivale, les festivaliers ont aussi profité des feux d’artifice, mais d’un peu plus loin que d’habitude. A 22 h 30 hier, 7000 billets avaient été vendus pour la soirée. MARTIN BERNARD
Une ode à l’écologie prononcée par Simonetta Sommaruga
La Gruyère, 3 août 2019 – Valentin Castella
La conseillère fédérale Simonetta Sommaruga était de passage en Gruyère à l’occasion de la Fête nationale. Après une visite dans l’Intyamon sur les terres du Parc naturel régional, la vice-présidente de la Confédération a tenu, à Gruyères, un discours prônant la responsabilité écologique.
Sonneurs de cloches, cors des Alpes, drapeaux suisses sur les balcons, chœur d’hommes: la cité comtale avait mis tous les atouts de son côté pour accueillir la conseillère fédérale Simonetta Sommaruga et ravir les nombreux touristes et la population en cette soirée du 1er Août. La rue principale, celle du Bourg, était bondée aux alentours de 20 h, à l’heure où la ministre du Département fédéral de l’environnement, des transports, de l’énergie et de la communication s’est avancée sur la scène pour prononcer son discours. Celle qui sera présidente de la Confédération pour la deuxième fois en 2020 a reçu un accueil chaleureux. Ancienne professeure de piano à Bulle et étudiante à Fribourg, la Bernoise a d’abord exprimé son attachement pour la région. «C’était un soir de novembre, l’année passée. Il faisait froid et j’étais un peu fatiguée. J’étais venue écouter la merveilleuse cantatrice Marie-Claude Chappuis. Elle a chanté ici en l’église de Gruyères avec le Chœur des armaillis de la Gruyère. Il s’est passé quelque chose ce soir-là. Quelque chose qui m’a transportée. Toute la fatigue s’est envolée. Après tant d’émotion, nous nous sommes retrouvés pour un apéritif. On m’a accueillie comme dans une famille et je me suis sentie à la maison.»
Dans l’Intyamon
C’est ce soir-là que le syndic de Gruyères Jean-Pierre Doutaz a proposé à la socialiste de revenir à l’occasion de la Fête nationale. La conseillère fédérale a accepté, en imposant ses conditions. C’est ce soir-là que le syndic de Gruyères Jean-Pierre Doutaz a proposé à la socialiste de revenir à l’occasion de la Fête nationale. La conseillère fédérale a accepté, en imposant ses conditions.
«Gruyères me donne des ailes. Alors, je vais m’envoler jusqu’au Moléson. De là-haut, il paraît qu’on y voit ma maison».
SIMONETTA SOMMARUGA
Elle ne voulait pas seulement prononcer quelques phrases au micro, mais aussi discuter avec les gens de la région. Ainsi, elle s’est rendue jeudi après-midi au-dessus de Montbovon en compagnie d’une délégation régionale, composée notamment du conseiller d’Etat Didier Castella. «Elle souhaitait se rendre dans le Parc naturel régional, explique Jean-Pierre Doutaz. Les gens du PNR ont évoqué la biodiversité et des agriculteurs ont également pu discuter avec elle. Elle s’est montrée très accessible et intéressée.» Retour ensuite à Gruyères, sur la scène, où elle a prononcé un discours concis et écologique: «Protéger le territoire, préserver la nature, c’est dans l’intérêt de notre population et de nos enfants. Je l’ai vu cet après-midi. Il est capital de préserver nos animaux, nos fleurs et nos forêts, nos poumons verts. A l’heure où le climat s’échauffe, c’est indispensable.»
Ne pas fermer les yeux
Elle a poursuivi: «Notre responsabilité est en jeu. Nous ne pouvons pas fermer les yeux sur la réalité des faits. La population attend de nous, politiciennes et politiciens, que nous prenions des mesures concrètes et efficaces contre le réchauffement climatique. Que nous le fassions ensemble avec nos entreprises, qui ont toutes les connaissances nécessaires. Ensemble aussi avec nos agriculteurs qui voient les dégâts chaque jour dans leurs champs et leurs pâturages. Ce n’est pas de l’hystérie, mais des faits!» Elle a conclu: «Je vous l’ai dit: Gruyères me donne des ailes. Alors, je vais m’envoler jusqu’au Moléson. De là-haut, il paraît qu’on y voit ma maison.» Sous le regard d’une sécurité discrète mais présente, la conseillère fédérale s’est ensuite octroyé un bain de foule. Poignées de mains, selfies, sourires… Une bienveillance générale, une simplicité qu’on n’a par exemple pas l’habitude de voir en France lorsque les politiciens vont à la rencontre de la population.